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Le parcours du combattant de l’abonné FTTH français en copropriété

(suite de mes pérégrinations débutées ici)

Les opérateurs délivrant de la fibre jusqu’à l’abonné (dite “FTTH”) sont au nombre de 3 :

  • FT/Orange
  • SFR
  • Free

On peut y ajouter Numéricâble qui est un cas particulier. Numéricâble est un cablo-opérateur de télévision qui a ajouté à son offre, à la fin des années 90, l’accès à Internet utilisant la technologie DOCSIS. Il ne délivre pas de la fibre jusqu’à l’abonné mais du câble coaxial cuivre pour télévision (quoiqu’il semblerait que Numéricâble fournisse maintenant de la “vraie” fibre FTTH mais je n’en sais pas plus).

Alors comment obtenir la fibre chez soi ?

Signature d’une convention avec un opérateur d’immeuble (OI)

Pour cela, il faut procéder au vote d’une résolution en assemblée générale. Le plus économique est de le faire lors de l’assemblée générale annuelle, afin de ne pas multiplier les convocations coûteuses.  Cette résolution donne l’autorisation au syndic d’immeuble de signer une convention avec un opérateur.

Or, les opérateurs se déplacent rarement avant d’avoir une convention signée, et ne peuvent vérifier la faisabilité technique qu’en se déplaçant.

Par ailleurs, comme je l’ai expliqué précédemment, Free s’est retiré de l’activité d’opérateur d’immeuble, et les autres opérateurs semblent éviter de (ou ne peuvent) se rendre dans les immeubles où Numéricable a été choisi comme opérateur d’immeuble.

Les deux seuls fournisseurs d’accès également opérateurs d’immeuble existant à Paris (et a priori c’est le cas par défaut dans toutes les grandes villes, à part les exceptions locales) à l’heure actuelle sont donc SFR (voir ici) et Orange (ici).

Mais il existe la possibilité d’être simplement opérateur d’immeuble sans être fournisseur d’accès, c’est par exemple ce qui se passe dans les Hauts de Seine avec Sequalum (merci à J.-B. Favre). On peut même imaginer des syndics d’immeuble qui seraient leur propre opérateur.

De plus, il est évidemment impossible d’être certain qu’un opérateur pressenti installera effectivement la fibre. Il a 6 mois pour le faire, après quoi la convention est caduque et il faut procéder à la signature avec un autre opérateur, en général à l’assemblée générale annuelle suivante. Sauf convocation exceptionnelle on peut donc perdre un an, c’est ce qui est arrivé dans ma copropriété.

Il est donc conseillé de rédiger une résolution d’AG “générique”, du style “accord de principe pour signer une convention avec un opérateur pour la pose de fibre, avec pouvoir au conseil syndical pour le choix de l’opérateur”, plutôt qu’une résolution nommant explicitement un opérateur.

Arrivée de l’opérateur d’immeuble

Une fois la convention signée, dans un délai de 6 mois, l’opérateur va venir :

  • effectuer un repérage des lieux pour le câblage horizontal (arrivée en bas d’immeuble) et le câblage vertical (relier les étages) et faire viser un dossier de travaux par le syndic d’immeuble ;
  • tirer une fibre de son réseau métropolitain jusqu’au bas d’immeuble
  • installer en bas d’immeuble un “point de mutualisation” permettant aux autres opérateurs de desservir l’immeuble
  • installer le câblage dit “vertical” pour desservir chaque bâtiment et chaque étage

Ces opérations prennent un certain temps. La pose effective du câblage vertical demande 1 ou 2 jours de travaux.

Création d’un accès abonné

Tout n’est pas encore prêt pour s’abonner à n’importe quel opérateur. !

  • cas le plus simple : on souhaite s’abonner à l’opérateur d’immeuble. Celui-ci envoie alors un technicien qui va procéder au raccordement de l’appartement, en posant un câble optique de l’armoire de palier (desservie en câblage vertical) jusqu’à l’appartement. Eh oui, les appartements ne sont pas systématiquement raccordés complètement lors du câblage vertical, en raison des coûts induits et des contraintes logistiques d’accès !
  • cas plus compliqué : on souhaite s’abonner à un autre opérateur.. C’est possible. Il faut alors que celui-ci pose à son tour une fibre horizontale jusqu’au bas d’immeuble, ou qu’il réutilise une fibre horizontale existante posée par un opérateur déjà présent (ce cas semble rare mais il existe entre SFR et Orange, voir les commentaires), puis se mette en contact avec l’opérateur d’immeuble pour être raccordé au point de mutualisation local. Il ne lui reste alors plus, comme ci-dessus, qu’à poser du câblage d’étage pour desservir l’appartement désiré.

Les délais ?

Il faut d’abord penser à intégrer une résolution à l’ordre du jour de l’assemblée générale suivante. Délai légal de convocation : 1 mois (il n’y a pas si longtemps, il me semble me souvenir que c’était seulement 2 semaines…)

Puis, si la résolution est votée, signer et envoyer la convocation, et attendre le passage de l’opérateur pour le repérage : de 1 semaine à 1 mois (estimation au doigt mouillé)

Puis pour les travaux : de 1 semaine à un mois pour attendre son tour (estimé aux entrailles de poisson), puis 1 ou 2 jours de pose horizontale + verticale.

Puis , pour un abonnement à l’opérateur d’immeuble ou un opérateur déjà présent : de 1 semaine à 1 mois (estimation marc de café), 1 ou 2 heures de pose.

Pour un abonnement à un autre opérateur non présent : repérage + pose fibre horizontale, de 1 à 3 mois (estimation astrologique), raccordement au point de mutualisation après accord avec l’opérateur d’immeuble : quelques semaines, pose chez l’abonné : idem ci-dessus.

Les totaux sont assez déprimants :

  • presque 2 mois d’attente dans le meilleur des cas, si l’on a la chance de s’y prendre juste avant l’AG et dans les délais.
  • probablement plutôt 3 à 4 mois si l’on fait vite côté immeuble et syndic mais que l’opérateur prend du temps ;
  • au pire, 8 à 9 mois si l’on fait vite côté immeuble et syndic mais que  l’opérateur ne réalise les travaux qu’à la fin de son délai de 6 mois
  • à quoi il faut ajouter 11 mois pour attendre la prochaine AG annuelle si elle vient juste d’avoir lieu

Ajoutez un mauvais suivi de la part du syndic (cas très fréquent), une mauvaise compréhension des procédures, un opérateur faisant faux bond, et vous pouvez facilement perdre des années supplémentaires.

Ainsi dans notre immeuble les démarches (signature de la première convention) ont été initiées en mars 2008 ; 4 ans 1/2 plus tard il faut tout reprendre à zéro.

Conclusions

  • ne pas s’étonner de la faible demande pour la fibre, vu le parcours du combattant qui précède et demande une sérieuse motivation de la part du syndic d’immeuble et conseil syndical, les opérateurs ne venant absolument solliciter personne.
  • ne pas s’étonner du retard français

Sans être grand devin, il est facile de voir que ce retard ne sera pas résorbé dans les années qui viennent, bien au contraire, puisque :

  • aucun changement législatif ou organisationnel ne semble actuellement en préparation pour simplifier cette procédure ;
  • le sujet qui intéresse l’ARCEP et les opérateurs est le déploiement du VDSL2, qui à moindre coût donnera une “seconde vie” au cuivre du siècle dernier ;
  • les opérateurs préfèrent investir dans la téléphonie mobile 4e génération (LTE), potentiellement plus rémunératrice.

Et grands merci à @_Galak_ et @lprevosto (sur Twitter) ainsi que l’assistance SFR qui m’ont grandement aidé à mieux comprendre ce qui précède…

Quant à Orange, c’est l’électroencéphalogramme totalement plat, aucune nouvelle d’eux directe ou indirecte, 9 jours après le premier contact avec l’assistance qui m’a assuré afin de me forcer à raccrocher que l’on allait “me rappeler”.

Mise à jour : suites

FTTH en France, saison 6 : du rififi chez le syndic, relance du dossier et repérage v2

Installation de la fibre (FTTH), suite de la saison 5.

 

Quand la fibre Free se fait attendre, même à Paris

(précision sur le titre : le “même à Paris” est une allusion à la densité de la ville, où donc la rentabilité par rapport à l’investissement, prétexte souvent soulevé par les opérateurs, est le moins susceptible de poser un problème)

À l’heure où beaucoup monde se plaint de ne pouvoir obtenir la fibre (à part une poignée de privilégiés qui l’ont déjà, sans compter les très rares qui pourraient l’avoir mais n’en veulent pas), une étude OCDE signalée par Numerama confirme le colossal retard français en la matière.

Récemment, Orange a annoncé triomphalement activer 4000 prises par semaine.

La situation dans mon immeuble :

  • immeuble construit en 2008
  • convention Free signée début 2011
  • repérage puis pose par Free de la desserte horizontale (égouts -> immeuble) en octobre/novembre 2011
  • depuis… rien !

On appelle “desserte horizontale” le raccordement par la rue, les égouts, etc, d’un immeuble au réseau d’un opérateur.

La “desserte verticale” est le câblage interne de l’immeuble, reliant l’arrivée horizontale aux logements à desservir.

Lorsque les deux sont réunis, on parle d’accès FTTH (fiber to the home, fibre jusqu’à l’habitation).

Voici donc une photo, prise le 13 novembre 2011, de l’arrivée de la fibre Free dans le sous-sol de mon immeuble, via les égouts de Paris. La fibre est munie d’une jolie étiquette verte “FREE INFRASTRUCTURE” avec une référence et un numéro de téléphone qui tombe sur un répondeur, renvoyant l’appelant vers d’autres numéros “spéciaux syndics d’immeuble” qui ne permettent jamais d’obtenir quelqu’un. On voit que la fibre est sagement enroulée, inutile, en attente d’être branchée sur un réseau vertical qui n’est toujours pas là, près d’un an après.

Dans mon immeuble, les questions logiques des résidents : “On a bien voté la convention fibre pour Free en assemblée générale annuelle ? Ça en est où ? Faut-il qu’on demande à un autre opérateur ?”

Notre immeuble est très loin de représenter un cas isolé, j’ai entendu parler d’exemples similaires à Paris et à Lyon. Les opérateurs se sont fait la course pour mettre un pied le plus rapidement possible dans les immeubles, mais se font tirer l’oreille pour terminer les travaux, prétextant une faible demande des abonnés..

Parallèlement, pour masquer le retard français, les pouvoirs publics utilisent les statistiques faussement flatteuses de Numéricâble, un réseau câblé de télévision vieux, à quelques rénovations près, de 30 ans, en fibre (moderne à l’époque) prolongée dans les immeubles par du câble coaxial tout à fait classique et aux performances bien moindres que la fibre optique de bout-en-bout.

Quant aux opérateurs, par souci d’économie, ils misent sur la technologie VDSL2 pour donner une “2ème vie” [sic] au réseau cuivre du téléphone classique. On ignorait que celui-ci était mort une première fois.

Mise à jour : je ne regrette pas d’avoir écrit et diffusé ceci sur twitter, j’ai pu avoir des retours sur la procédure à suivre pour avancer. Free semble avoir résilié la convention d’immeuble.

Il nous appartient donc de choisir un nouvel opérateur d’immeuble  lors de la prochaine assemblée générale ; cet opérateur pourra effectuer la pose du câblage vertical et utiliser la fibre posée par Free.

Mise à jour 2 : il s’avère que les deux seuls opérateurs installant du FTTH en France en tant qu’opérateur d’immeuble actuellement sont SFR et FT/Orange. Merci beaucoup aux personnes qui m’ont donné des contacts (SFR très réactif…).

L’ARC (association conseillant les syndics de copropriété) arrive aux mêmes constatations, mais conseille carrément de rester en ADSL, ce qui est absurde et désolant. L’ARC soulève des arguments spécieux à mon sens contre les conventions des opérateurs (en fait reprises d’un modèle ARCEP) : durée de 25 ans (compréhensible, cela limite les interventions perpétuelles en AG, mais elles peuvent être résiliées avec préavis de 18 mois) et non-propriété du câblage à l’issue de la convention (compréhensible également : je vois mal les copropriétés se charger de la maintenance/entretien/évolution technique ou avoir un prestataire supplémentaire à trouver pour cela).

Voir :

Fusion (froide) CSA-ARCEP-HADOPI, préservation des anachronismes

La dernière idée en date des lobbyistes de l’industrie du divertissement, très écoutés au ministère de la Culture, date de plusieurs mois mais fait couler beaucoup d’encre depuis la rentrée.

Il s’agit de proposer la fusion de trois éminentes “autorités administratives indépendantes” : CSA, HADOPI et ARCEP, sous prétexte d’accompagner l’évolution technologique (la déferlante Internet qui s’annonce an matière de télévision), mais en réalité dans le but d’en ralentir les effets néfastes sur les situations acquises de l’industrie du divertissement et le contrôle politique “citoyen” sur les média.

Le CSA

D’un côté le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) dont la mission consiste à garantir la liberté de communication audiovisuelle en France. Le CSA a été constitué (sous le nom de Haute Autorité de la communication audiovisuelle) en 1982, quelques années après la disparition de l’ORTF, et pour préparer l’arrivée des premières chaînes privées.

Le CSA indique avoir les responsabilités suivantes :

  • la protection des mineurs
  • le respect de l’expression pluraliste des courants d’opinion
  • l’organisation des campagnes électorales à la radio et à la télévision
  • la rigueur dans le traitement de l’information
  • l’attribution des fréquences aux opérateurs
  • le respect de la dignité de la personne humaine, la protection des consommateurs
  • « veiller à la défense et à l’illustration de la langue et de la culture françaises » sur les antennes
  • rendre les programmes de la télévision accessibles aux personnes souffrant d’un handicap auditif ou visuel
  • veiller à la représentation de la diversité de notre société dans les médias
  • contribuer aux actions en faveur de la protection de la santé
  • etc [sic]

Une autre page détaille d’autres missions, dont l’attribution des canaux de télévision hertzienne (maintenant TNT), en expliquant que “la contrepartie de cette liberté est l’institution d’une fonction de régulation, chargée d’accompagner ce mouvement et d’en prévenir les éventuelles dérives“.

Je laisse au lecteur le soin de déterminer en quoi les responsabilités qui précèdent ont, ou pas, un rapport avec la mission générale de garantie de la liberté de communication audiovisuelle.

En ce qui concerne par exemple l’organisation des campagnes électorales, on se souviendra de la dernière élection présidentielle avec les débats ubuesques sur les temps de parole comparés, ou les heures autorisées de publication de résultats estimés qui ont toujours circulé sous le manteau et aujourd’hui quasi ouvertement via Internet, les nuages IP ne s’arrêtant pas à la frontière (incidemment j’ai écrit ceci avant de voir qu’un des articles cités en bas se servait du même exemple comme argument en faveur d’une fusion, alors qu’à l’évidence ni une fusion ni une extension des pouvoirs du CSA ne changera rien à la situation, ni à ce que les média étrangers ont le droit de diffuser, ni aux personnes qu’il est possible de poursuivre).

Le CSA tire sa légitimité, ou plutôt sa capacité d’action donc son influence, de la rareté des ressources. Les canaux hertziens de télévision ou radio ne sont pas (ou plutôt n’étaient pas, mais n’anticipons pas) en nombre illimité, et leur attribution nécessite de pouvoir montrer patte blanche et une capacité à les remplir.

L’ARCEP

L’ARCEP quant à elle a pour mission la régulation des télécommunications et des postes, dont l’attribution des ressources rares que sont fréquences hertziennes et plages de numéros téléphoniques. L’ARCEP possède un rôle essentiellement technique et concurrentiel et en aucun cas ne se mêle de régulation des contenus, respectant d’ailleurs en cela le bon vieux modèle OSI d’indépendance des couches.

La HADOPI

La HADOPI, bien connue sur Internet et ici, est proposée également comme partie prenante de la fusion, et ses missions “pédagogiques” sont explicitement téléguidées par l’industrie du divertissement via le ministère de la Culture.

Les mutations de l’audiovisuel

Jusqu’à ces dernières années, les choses étaient simples.

D’un côté la télévision, média grand public aux canaux gérés depuis des décennies par une poignée de groupes bien établis, chapeautés par des autorités dont le dernir avatar en date est le CSA.

De l’autre, Internet, réseau informatique presque confidentiel par comparaison avec la télévision, et dont les capacités techniques permettaient difficilement le transport à grande échelle de contenus vidéo.

En à peine 10 ans, quatre évolutions technologiques ont tout balayé : la vidéo numérique (mpeg…), l’ADSL et le triple-play, la TNT, le P2P.

La TNT est à la fois un succès et un échec. Un succès technologique, puisqu’elle remplace haut la main la télévision analogique et augmente considérablement la capacité hertzienne (dividende numérique, permettant de libérer des fréquences pour le téléphone mobile). Mais un échec en termes de contenus (remplissage avec des séries américaines de seconde zone, difficulté à trouver des opérateurs pour les nouvelles chaînes disponibles) et d’audience, mécaniquement éparpillée sur 5 à 6 fois plus de chaînes, et concurrencée par le développement d’Internet.

La TNP (télévision numérique personnelle), avatar mobile de la TNT, et la radio numérique, sont un échec complet et ne sont pas déployées.

L’ADSL a permis l’augmentation des débits des abonnés Internet, et la diffusion de bouquets télévisés par les fournisseur d’accès. Cette évolution n’avait absolument pas été anticipée par les chaînes de télévision.

Enfin, le P2P, profitant de la vidéo numérique et de l’augmentation des débits, a fourni un moyen d’échange pratique de contenus “à la demande” ou presque, en l’absence d’offre commerciale sérieuse.

La délinéarisation

La délinéarisation, c’est la disparition de la nécessité d’être devant son poste de télévision à l’heure dite pour regarder son émission préférée. Grâce à la numérisation, aux progrès en termes de stockage et de transmission, elle a beaucoup avancé depuis ce que permettait le magnétoscope :

  • le P2P, précurseur
  • la VoD gratuite sur Internet (Youtube…)
  • la VoD payante…
  • les fonctions d’enregistreur numérique des box ADSL
  • les divers services de Replay, par les fournisseurs d’accès ou les chaînes elles-mêmes

Et ce n’est qu’un début. Là où aujourd’hui il est possible de retrouver l’émission ou l’épisode que l’on a raté la veille au soir, dans quelques années on pourra demander n’importe quel épisode, dès que les ayants-droit l’auront accepté.

La délinéarisation massive et Internet sont les grands amis des missions principales du CSA :

  1. Ils multiplient à l’infini les sources, assurant le pluralisme qui devient “naturel”
  2. Ils donnent accès à tous ceux qui le désirent à une diffusion planétaire
  3. Ils réduisent la granularité du contenu, faisant disparaître la notion de “chaîne” et rendant caduque celle de “quota”

Sur Internet le CSA ne peut donc se prévaloir d’aucune utilité sur lesdites missions.

À plus ou moins long terme on peut prédire que la délinéarisation va transférer sur Internet l’essentiel des diffusions “en boite” : tout ce qui n’est pas diffusé en direct, émissions, séries, films, etc. La diffusion télévisée garde encore temporairement son intérêt pour la diffusion à grande échelle d’émissions ou événements en direct.

Internet est en train (à 5-10 ans d’échéance) de tuer révolutionner la télévision telle que nous la connaissons, et c’est bien cela qui inquiète l’industrie du divertissement. Pour les sceptiques, voir ceci : MIPCOM : Youtube part à l’assaut de la télévision.

La télévision connectée

Parler de “télévision connectée” pour justifier une fusion CSA-ARCEP-HADOPI, c’est voir les choses par le petit bout de la lorgnette.

Le terminal utilisé n’a aucune importance, si ce n’est savoir qui en maîtrise le logiciel.

Certains brancheront leur télévision sur Internet pour des visionnages en famille, d’autres se contenteront d’une tablette ou d’un téléphone mobile, d’autres encore brancheront l’ordinateur sur la télévision.

Même d’un point de vue de politique industrielle ou protectionniste, cela fait bien longtemps que tous ces matériels électroniques ne sont plus fabriqués en Europe sinon en quantités insignifiantes.

Les Google-TV et Apple-TV ont été des flops mémorables… pour l’instant, mais l’essentiel est là pour diffuser massivement de la vidéo à la demande : les périphériques (ordinateurs, téléphones, tablettes ou téléviseurs améliorés…), l’infrastructure, l’offre commerciale (les app-stores). Seuls les catalogues laissent encore à désirer..

Qu’on ne s’y trompe pas : Google et Apple vont très prochainement être présentés comme les forces à combattre ou à taxer, justifiant protectionnisme législatif et fiscal, mais la fusion CSA-ARCEP vise la régulation des contenus sur Internet au sens large.

La situation à ce jour

On se trouve donc en présence aujourd’hui :

  • d’un CSA qui voit son pouvoir et sa légitimité s’effriter à mesure que l’audience et les contenus se déplacent de la télévision vers Internet, et qui n’a jamais franchement prouvé son indépendance par rapport au pouvoir politique ;
  • de conglomérats d’anciens média qui tirent les mêmes conclusions que le CSA, ne comprennent Intenet que comme un danger, et de plus constatent le rétrécissement progressif de leurs recettes publicitaires télévisées ;
  • d’un pouvoir politique tenté, comme toujours en France, de préserver des situations acquises au détriment de l’avenir, et éventuellement désireux d’économiser quelques postes en réduisant le nombre pléthorique d'”autorités” ;
  • d’une ARCEP qui défend une indépendance relative mais assez largement reconnue, démontrée notamment lors de l’attribution de la 4e licence de téléphonie mobile.

La proposition de fusion CSA-ARCEP, dont les premières réflexions ont été initiées sous la présidence précédente, vise donc avant tout à tenter de préserver les situations acquises, indépendamment de tout pragmatisme vis-à-vis d’usages et de technologie dont l’évolution n’a pas attendu  le législateur. Sans grande surprise, cette fusion est d’ailleurs soutenue par Bouygues (propriétaire de TF1) et Vivendi.

Sur le papier, le CSA a beaucoup à y gagner, avec une  extension théorique de ses pouvoirs, un transfert de ceux-ci sur Internet ne faisant que suivre celui des contenus. En pratique, ces moyens ont été pensés à l’ère de la télévision et sont totalement inapplicables sur Internet ; quant à ses missions officielles, elles sont remplies “par construction” sur Internet.

Pour se convaincre de l’impossibilité de gérer Internet comme la télévision, il suffit de se demander s’il semble possible de rendre Internet aussi aseptisé que la télévision française.

La proposition de joindre à cette fusion la HADOPI ne fait que démontrer à nouveau la volonté de mainmise des industries du divertissement.

En revanche l’ARCEP, qui reste la dernière instance à peu près indépendante des industries du divertissement, a énormément à y perdre, et avec elle le citoyen, le consommateur, et toute l’industrie d’Internet.

 

Des articles en rapport sur la question :

 

 

 

 

Signalspam, emailvision, gmail et le spam

(petit texte résumant/archivant un ensemble de tweets réalisés ce matin)

Ce matin, je tombe sur ce tweet de Stéphane Bortzmeyer : Si vous doutiez encore que SignalSpam, c’est du pipeau :  http://eric.bachard.org/news/index.php?post/2012/07/20/Une-histoire-de-spam-…-et-de-spammeurs

J’ai déjà parlé ici de SignalSpam.

Et en effet, en fouinant dans mon dossier de spam, je constate que le prestataire concerné (emailvision), dont SignalSpam se gargarise du partenariat, m’a envoyé 104 spams depuis 8 mois exactement, sans compter une newsletter expédiée pour le compte de Bouygues Télécom dont personne n’arrive à me désabonner depuis des mois, ni moi-même via les procédures prévues pour cela, ni le support Bouygues lui-même.

Bref, voici l’incantation pour mutt pour trier tout ça avant envoi à SignalSpam. Cela risque de ne pas servir à grand chose, mais c’est vite fait :

l ~h ^X-EMV-CampagneId:

Vérifiez les messages et marquez (tag : t) ceux qui sont effectivement des spams. 241 sur 261 dans mon cas, car emailvision est opérateur de newsletters pour des sociétés, ce qui lui permet de nier de toute responsabilité dans l’exploitation de listes d’adresses collectées par détournement de finalité. 241/261 est donc le ratio de spam et on voit que l’activité réelle hors spam est réduite à la portion congrue.

Soumettre (avec le script ci-dessous) à SignalSpam :

;| signalspam votremotdepasse

Mon script Python est là et fonctionne encore : http://signal.eu.org/blog/wp-content/uploads/2007/05/signalspam.txt

Google n’est pas en reste puisque ce même matin j’ai reçu 11 spams d’un compte Gmail parfaitement valide, via Google Groups, sans aucun lien abuse pour les plaintes.

Filtrage, subsidiarité et censure dans l’affaire Copwatch

(ceci n’est pas une analyse juridique — je ne suis pas juriste, ce qui me donne le droit d’énoncer des absurdités juridiques en me concentrant sur l’esprit de la loi plutôt que sa lettre)

Je suis de retour de vacances, pendant lesquelles il a fallu gérer le dernier épisode de l’affaire Copwatch 2 (merci la 3G). Comme promis, je reviens dessus en détail maintenant que j’ai plus de temps.

Merci Copwatch, d’abord, pour avoir permis que l’affaire se “résolve” sans heurts, ou “en application du principe de subsidiarité” comme on dit chez les juristes, évitant que le risque de surfiltrage pesant sur eu.org se matérialise. À ce sujet, Copwatch a diffusé le 26 février un communiqué. et PCINpact a publié un court article.

Est-ce de la censure ?

Il ne s’agit pas de censure à strictement parler (voir le dictionnaire le terme de censure sous-entend généralement l’existence d’une autorité administrative type commission de censure).

Mais inutile de tourner autour du pot : dans la mesure où il s’agit de faire disparaître ou rendre inaccessible un contenu, le terme de censure, ordonnée ici par la justice, n’est pas inadapté.

Quelques rappels

Le fond de l’affaire portait sur le droit à l’image des policiers visés par le site, et sur la diffamation à l’égard des institutions.

Deux des responsables du collectif Copwatch sont apparus à visage découvert, en dévoilant même ce qui semble être leur vraie identité, le 26 janvier 2012, dans un reportage télévisé au journal de 20 heures de France 2.  C’est apparemment cette médiatisation du nouveau site qui a motivé la seconde action en justice du ministère.

Point essentiel, comme cela a été déjà expliqué, le ministère de l’Intérieur n’a pas cherché à assigner l’éditeur du site. L’avocat du ministère a, à l’audience, expliqué que la LCEN (voir aussi l’article Wikipedia) ne l’obligeait nullement à retrouver l’éditeur du site si celui-ci n’indiquait pas, comme le demande la loi, son identité sur son site. Retrouver les auteurs n’était probablement pas très difficile, a fortiori pour le plaignant vu sa qualité. Les contacter était extrêmement facile, grâce aux bases Whois qui fournissaient une adresse email de contact en liaison avec le nom de domaine. L’avocat du ministère a même avoué savoir utiliser Whois.

Le ministère a donc demandé à la justice, et obtenu, le filtrage du site. Il a été débouté sur sa demande de filtrage des miroirs, ainsi que sur sa demande de filtrage des miroirs ultérieurs sans nouvelle décision de justice.

Peut-on imaginer que n’importe qui d’autre, agissant pour les mêmes motifs (diffamation, injures et droit à l’image), aurait eu la moindre chance de voir décidé un filtrage national en sa faveur ? C’est extrêmement peu probable, et la meilleure preuve en est que cela ne s’est jamais produit, bien que les affaires de diffamation ou droit à l’image soient courantes. Le seul cas similaire à ma connaissance est celui du site de jeu en ligne stanjames.com dont le filtrage a été demandé par l’ARJEL en avril 2011, en application de la loi sur les jeux en ligne.

Les affaires Copwatch constituent donc un précédent.

La décision de justice a-t-elle été appliquée ?

Oui. Le domaine copwatchnord-idf.eu.org n’existe plus depuis le 27 février. Il n’est donc pas nécessaire de le filtrer. Par ailleurs, la décision de justice ne demandait le filtrage que chez 5 gros fournisseurs d’accès français, alors que la suppression du domaine le rend totalement inaccessible.

Le résultat obtenu est-il conforme à ce que demandaient les plaignants ?

Non, pour plusieurs raisons.

Le site est toujours accessible sous d’autres noms et comporte maintenant de nombreux miroirs.

La justice a refusé le blocage aux sites miroirs (contenu pas toujours identique au site principal, voire sans rapport aucun dans certains cas), et surtout l’extension du blocage à de futurs miroirs sans repasser devant un juge.

Elle a également demandé au plaignant d’assumer les coûts induits par la mise en œuvre du blocage.

Enfin, la stratégie des plaignants semble indiquer une préférence de leur part pour ‘un filtrage national plutôt que l’application pragmatique du principe de subsidiarité.

Et les fournisseurs d’accès ?

Ils ont été remarquablement discrets, pour la plupart d’entre eux. Aucun d’entre eux n’a, à ma connaissance, mis en œuvre un nouveau filtrage, ni dit publiquement ce qu’il aurait fait en l’absence d’action de la part de eu.org ou de Copwatch. Du coup, la question des recours qu’aurait eu.org contre du surfiltrage devient (heureusement) caduque.

L’objectif : un filtrage national automatisé

Cette procédure visant Copwatch s’inscrit, en réalité, dans une stratégie beaucoup plus large de la part du gouvernement visant à mettre en place des procédures administratives “simplifiées”de filtrage d’Internet.

Simplifiées, c’est à dire : sans juge, soumises à validation par une simple décision administrative, automatisées pour leur déploiement chez les fournisseurs, et opaques quant aux sites concernés donc rendant impossible toute vérification de légitimité ou de pertinence.

Pour quelques manifestations publiques de cette stratégie, voir par exemple la lettre d’Éric Besson au CGIET concernant Wikileaksles propositions d’Éric Besson pour modifier les décrets d’application de la LCEN, ce texte du même CGIET évoquant un filtrage BGP ou DNS national (avec, à titre anecdotique, un développé inexact de l’acronyme BGP, indice montrant que l’exactitude ou la faisabilité technique ne sont actuellement pas les préoccupations centrales) et le décret d’application attendu concernant l’article 4 de la loi LOPPSI 2. On peut citer également, cette fois à l’initiative ou au bénéfice des ayants-droit de l’industrie du divertissement, l’assignation pour le blocage d’Allostreaming, ou la maintenant fameuse loi Hadopi permettant la coupure de l’accès d’un abonné Internet, qui n’est pas plus logique que de demander à EDF de vous couper le courant pour la même raison.

En supposant que des moyens techniques nationaux puissent être déployés pour automatiser la coupure d’un site dans les cas particuliers cités ci-dessus, il n’y a aucun doute que, par “appel d’air”, les modalités en seraient rapidement étendues ensuite à d’autres types de sites illégaux : certains cas ont déjà été publiquement évoqués à l’assemblée nationale. La liste déjà longue et nullement exhaustive du paragraphe précédent ne couvre que certaines initiatives de ces 2 dernières années.

On pourrait bel et bien parler, alors, de censure d’Internet, qui aboutirait inévitablement à la mise en place de moyens techniques coûteux et dédiés au filtrage en masse, par opposition à un filtrage actuellement réalisé de manière artisanale visant des sites qui se comptent sur les doigts d’une seule main.

Cela servirait-il à quelque chose ? Non, comme le montre la continuation de l’activité de Copwatch (qui y a, au contraire, gagné une publicité certaine comme on pouvait l’anticiper), et comme l’a également montré a contrario l’affaire Megaupload (partage de fichiers contrefaits) par une action musclée “à la source”.

En résumé, il s’agirait d’un filtrage techniquement imparfait, coûteux et financé par le contribuable, opaque et dangereux pour les libertés publiques, inefficace et à la contre-productivité démontrée.

Ce n’est pas l’idée que je me fais de l’efficacité des politiques publiques. Espérons que les pouvoirs publics retrouveront rapidement leurs esprits.

Le sujet n’est pas clos : si vous vous intéressez à l’actualité sur ces questions, vous pouvez vous tenir informé par des sites de veille comme PCINpact et Numerama déjà abondamment cités ici.

Suppression de copwatchnord-idf.eu.org

(suite de Blocage et surblocage : suites de l’affaire Copwatch version 2)

Une mise à jour rapide pour annoncer que le domaine copwatchnord-idf.eu.org a été supprimé de la nouvelle mise à jour de la zone eu.org, ce matin à 11 heures, suite à la demande du détenteur du domaine.

Le serveur HTTP pour copwatchnord-idf.eu.org redirige apparemment (à l’instant où j’écris ceci) les requêtes vers https://copwatchnord-idf.org/, déjà bloqué par la décision de justice d’octobre.

C’est une démonstration intéressante du principe de subsidiarité… Un billet complémentaire viendra d’ici quelques jours, lorsque j’aurai eu le temps de l’écrire…

Blocage et surblocage : suites de l’affaire Copwatch version 2

(voir ici le résumé des épisodes précédents)

J’ai reçu ce matin une lettre de Free, une des parties assignées dans l’affaire Copwatch version 2.

Je précise qu’aucun autre fournisseur, ni aucun des plaignants, ni leurs avocats, n’ont à aucun moment tenté d’entrer en contact avec eu.org dans cette affaire.

Free a sollicité eu.org en application du principe de subsidiarité, proposant qu’eu.org invite Copwatch à mettre hors ligne son site https://copwatchnord-idf.eu.org/ ; et si nécessaire, suspende le domaine copwatchnord-idf.eu.org.

Cela permettrait d’éviter la mise en œuvre de filtrage brutal IP ou DNS au niveau national, en application du jugement, auquel réfléchissent en ce moment même les 6 fournisseurs d’accès assignés au procès.

Un filtrage à grande échelle n’est jamais une bonne solution, pour la liste suivante de raisons qui ne prétend aucunement être exhaustive.

Pour du filtrage IP :

  • les inévitables surblocages qui en résultent : un site ou un ensemble de sites au lieu de quelques pages, un ensemble de services au lieu du service web seul, etc ;
  • la lourdeur technique de mise en œuvre, avec intervention sur les routeurs des fournisseurs, ce qui n’est jamais anodin.

Pour du filtrage DNS :

  • de même les surblocages qui en résultent : un site ou un ensemble de sites au lieu de quelques pages, un ensemble de services au lieu du web seul, etc ;
  • la nécessité d’intervention sur les serveurs de résolution DNS des fournisseurs, ce qui n’est pas anodin non plus, et pas forcément possible car le plus souvent les logiciels DNS utilisés sur lesdits serveurs n’ont pas été conçus pour cela.

Et pour tout filtrage :

  • son inefficacité relative, puisque les 6 fournisseurs concernés sont loin de représenter la totalité des accès à Internet en France ;
  • comparativement, la grande facilité de contournement par mise en place de miroirs ;
  • les risques de surblocage dans le temps, les règles de filtrage pouvant subsister des années après la disparition de la cause qui les a provoquées.

Et en l’occurrence, le filtrage DNS pourrait être d’autant plus brutal que certains des fournisseurs concernés ne seraient pas en mesure de le réaliser plus finement qu’au second niveau. C’est ainsi tout eu.org et ses 20.000 sous-domaines qui seraient bloqués en France, autrement dit un surblocage colossal. On frémit en imaginant ce qui se passerait si example.co.uk, example.co.jp ou exemple.asso.fr devaient être bloqués par DNS par des fournisseurs dans ces conditions, suite à une décision de justice.

On peut se poser aussi la question du recours qu’aurait eu.org si une telle mesure de surblocage était mise en place. Contre qui eu.org devrait-il se retourner ? eu.org devrait-il assigner chacun des fournisseurs filtreurs, et à quel titre : LCEN, entrave au fonctionnement d’un système automatisé… ?

On notera enfin qu’il s’agit d’une première depuis l’existence de eu.org, créé en 1996.

eu.org a donc transmis ce jour la demande à Copwatch.

Jugement Copwatch version 2

(suite des billets Au sujet de copwatchnord-idf.eu.org et Compte-rendu de l’audience Copwatch version 2)

Le jugement a comme prévu été rendu vendredi. Il a fallu attendre ce lundi pour que cette copie en soit accessible sur Internet.

Le ministère de l’Intérieur est débouté sur l’essentiel de ses demandes :

– la demande de blocage du site http://copwatchnord-idf.meta.gd/ est rejetée : il semblerait que le site soit hébergé sur une Dédibox (88.190.232.92 au moment où j’écris ces lignes) c’est-à-dire chez Free/Online qu’il est peut-être possible de couper sans mettre en branle des mesures disproportionnées de filtrage au niveau national ;

– les demandes sur les 34 autres miroirs sont rejetées par manque de preuves ;

– la demande d’étendre automatiquement le filtrage en cas de déplacement des miroirs est également rejetée. Cf l’argumentaire très intéressant en page 16 du jugement. Ce dernier point était particulièrement crucial car une demande similaire a été formulée par les ayants-droit dans l’affaire Allostreaming, non encore jugée. PCinpact fournit une analyse détaillée  de cette question.

Il est donc au final simplement demandé aux fournisseurs d’accès à Internet assignés le blocage par DNS ou IP du site http://copwatchnord-idf.eu.org/ qui ne semblent pas encore complètement en œuvre au moment où j’écris ces lignes.

L’avenir nous dira si nous aurons droit à des Copwatch v3 voire v4, v5…

Voir aussi l’analyse de Numérama.

Compte-rendu de l’audience Copwatch version 2

Aujourd’hui 7 février, à 14 heures, se tenait l’audience publique relative à la nouvelle affaire Copwatch.

Bien que n’étant pas convoqué ni assigné, j’y ai assisté.

L’audience se tenait au fin fond du palais de justice de Paris, en haut d’une tour (dite la tour d’argent, mais on n’y mange pas) au dernier étage d’un escalier en colimaçon, charpente en bois et salle glaciale.

Les six plus gros fournisseurs d’accès français (Free, Orange, SFR, Bouygues Télécom, Numéricâble, Darty Télécom) étaient assignés par le ministère de l’Intérieur et des syndicats de policiers pour demander la disparition d’un certain nombre de pages web sur le site incriminé.

L’audience a duré plus de 3 heures, en effet l’affaire n’est pas identique à l’affaire d’octobre, il ne suffit pas de décider d’une nouvelle liste de sites à filtrer. De nombreux miroirs sont apparus (plus de 30), les injures auraient été retirées, resteraient la divulgation de données personnelles qui aurait été constatée par huissier, et accessoirement la diffamation.

Une rumeur disait que les éditeurs du site Copwatch (non assignés) étaient présents dans le public. Ils ne se sont cependant pas exprimés.

Le ministère de l’Intérieur demande que les pages incriminées ne soient plus accessibles. Quitte à bloquer (surbloquer) pour cela l’ensemble du site (toutes les pages, mêmes celles qui ne sont pas litigieuses) si des mesures techniques plus précises ne sont pas possibles.

La particularité de cette assignation était la demande par le ministère de l’Intérieur d’étendre toute mesure de blocage à tout site nouveau diffusant un contenu identique à celui jugé illicite. Autrement dit, effectuer la mise à jour dans le futur du blocage du site Copwatch, sous la responsabilité des fournisseurs d’accès, sans intervention d’un juge.

Les syndicats de policiers avaient les mêmes demandes, insistant tout de même sur la bien plus grande gravité de la divulgation d’informations personnelles puisqu’elle pouvait mettre des policiers en danger.

La position des fournisseurs d’accès, du moins telle qu’elle a été exprimée et que je l’ai comprise, est assez classique :

1) le filtrage par page, qui nécessite du DPI, est trop intrusif (libertés publiques) et trop coûteux (Orange/FT a évoqué pour sa part la somme de 10M€) ;

2) restent le filtrage par adresse IP ou par le DNS. Seuls Orange et Bouygues sont en mesure de réaliser ce dernier facilement, pas Free ni SFR ; le surblocage qui en découle, bien que gênant lui aussi vis à vis des libertés publiques, est connu et assumé. L’affaire ARJEL (blocage DNS de site illégaux de jeu en ligne) a été citée. L’avocat de SFR a en outre rappelé que le blocage DNS résulte en un surblocage d’autres services, comme le courrier.

3) l’intervention d’un juge est absolument nécessaire afin de donner lieu à débat contradictoire, il est hors de question d’étendre la mesure “automatiquement” aux miroirs futurs.

4) le blocage est inefficace : le site coupé en octobre est réapparu quelques heures après (effet Streisand) et non le 25 janvier qui est la date de sa médiatisation. Les avocats des fournisseurs n’ont pas envie  de revenir tous les 2 mois pour de nouvelles interventions inutiles.

5) la seule stratégie viable pour faire disparaître les contenus incriminés est d’agir à la source. L’affaire MegaUpload a bien entendu été citée.

6) seuls 2 sites (copwatchnord-idf.eu.org et copwatchnord-idf.meta.gd) ont donné lieu à des constats d’huissier, les infractions sur les autres sites ne sont pas démontrées et il n’est donc pas possible de les bloquer.

Le ministère de l’Intérieur ne semble pas avoir poussé très loin les investigations pour identifier l’éditeur du site,  ce qui a suscité un certain étonnement chez les défendeurs comme de la part du président. C’est d’autant plus étonnant que, par sa fonction même, le ministère de l’Intérieur est le mieux placé en la matière.

Détail cocasse, l’avocat du ministère de l’Intérieur a dit être persuadé que des informations sur l’audience circulaient à l’instant même où il s’exprimait. Et en effet, nous étions plusieurs personnes à en faire un compte-rendu en temps réel sur Twitter.

Le ministère public estime que la “subsidiarité a été démontrée” pour les 2 sites “principaux” , mais pas pour tous les autres ; que les interdictions de sites sont plus graves que des interdictions de pages mais ne portent pas atteinte à la liberté d’expression puisque l’éditeur est masqué ; et enfin, que des interdictions futures automatiques sont inconcevables.

Le jugement sera rendu vendredi 10 février à 16 heures.

On notera que la possibilité de demander une coupure de domaine DNS à la source n’a absolument pas été évoquée dans les débats, ce qui sur le fond ne changerait de toute façon rien à l’efficacité des mesures prises.

Complément par PCinpact avant l’audience : http://www.pcinpact.com/news/68786-copwatch-blocage-filtrage-miroirs-futurs.htm

Compte-rendu de PCinpact : http://www.pcinpact.com/news/68797-copwatch-parquet-claude-gueant-inconcevable.htm

Le Point : http://www.lepoint.fr/societe/la-justice-une-nouvelle-fois-sommee-d-interdire-des-pages-du-site-copwatch-07-02-2012-1428434_23.php

Numerama : http://www.numerama.com/magazine/21446-pourquoi-et-comment-claude-gueant-veut-faire-refermer-copwatch.html

Bluetouff sur Reflets http://reflets.info/whos-fucking-next/

Un client Free qui a mis un miroir chez lui a été contacté par le fournisseur : http://sebsauvage.net/rhaa/index.php?2012/02/07/13/28/23-assignation-en-refere

Petites expériences de couverture de Free Mobile

La mise en service du réseau Free Mobile est l’objet de polémiques, notamment en provenance des 3 opérateurs déjà installés qui voient d’un mauvais œil l’apparition d’un nouveau concurrent sur ce marché rémunérateur. Les mauvaises langues ont été jusqu’à prétendre que toutes les antennes Free étaient éteintes.

Or il est très facile de faire soi-même quelques vérifications, sans avoir pour cela besoin d’huissiers ou de spécialistes.

J’ai utilisé les fonctions de base de mon téléphone, et aussi l’application Android Sensorly, qui permet de collecter des relevés et de les envoyer via Internet pour la constitution de cartes de réception des opérateurs. Ces cartes sont accessibles sur le web : ainsi voici les cartes des couverture des antennes Free et antennes Orange, ou des antennes Free seules.

Vous pouvez voir avec votre téléphone si une antenne Free se trouve à proximité, même si vous n’avez pas de SIM Free. Dans Android il faut se rendre dans Paramètres > Sans fil et réseaux > Réseaux mobiles > Opérateur de réseau et vous obtiendrez une page similaire à celle-ci :

(cliquer sur les images pour les agrandir)

FRA-15 est l’identifiant des antennes Free “natives”. Si cet identifiant apparaît, c’est qu’une antenne de cet opérateur est à portée de réception.

Si par contre vous avez une SIM Free, vous verrez ceci :

Le premier “Free” est celui qui apparaissait précédemment comme FRA-15, le second est en réalité Orange. Un accord a été passé entre les deux opérateurs pour masquer le nom d’Orange aux abonnés Free, afin sans doute d’éviter de les traumatiser. Si un seul Free apparaît, c’est ou bien qu’il n’existe qu’une antenne Orange à portée et pas d’antenne Free, ou bien le contraire (le premier cas étant le plus probable actuellement, Orange ayant une meilleure couverture).

.Il est alors possible de sélectionner le 1er Free (du moins sur mon téléphone il a toujours figuré en premier… on le remarque par le temps d’accrochage beaucoup plus long que chez Orange, en raison de la réception difficile) pour tenter de s’identifier sur cette antenne “native”. La présence d’une antenne Free “native” ne signifie pas automatiquement qu’il est possible de l’utiliser (elle peut être trop lointaine pour recevoir les signaux de notre téléphone).

On peut ensuite avec vérifier dans la page “Détails” de l’application Sensorly, qui en profitera pour effectuer un relevé. Sur ce premier exemple, bien que MCC/MNC soient bien ceux de Free (208-15), la tentative d’accrochage n’a pas encore abouti, comme le montrent les champs LAC et Cell Id à 0 ainsi que le petit “x” en haut, dans les barres de réception :

Sur l’exemple qui suit, le téléphone s’est enfin accroché sur l’antenne Free et est donc en mesure d’indiquer le Cell Id. Il m’a fallu de nombreux essais depuis différents lieux avant d’y arriver. La mention “No connection” semble indiquer que la connexion n’est pas utilisable, pourtant j’ai déjà réussi à passer des appels ainsi, même avec des barres de réception en haut de l’écran restées grises au lieu de passer en vert :

 

Avec l’application GSM Signal Monitoring: on obtient un peu plus d’informations. On note que le Cell-Id affiché n’est pas le même qu’avec Sensorly, pourtant il s’agit très probablement de la même antenne. On peut voir également à la couleur orange-rouge de la barre que l’application juge le niveau de réception (-91 dBm) relativement faible. Cela s’explique sans doute par la distance de l’antenne, de 600 mètres en zone urbaine dense. Théoriquement cette application donne la liste de toutes les antennes avec leur niveau de réception, en pratique sur mon téléphone il n’y en a jamais plus d’une visible à la fois, même avec un autre opérateur que Free.

 

 

 

 

 

 

 

Pendant ce temps Sensorly collecte les informations sur les antennes visibles, comme le montre la petite icone en haut de l’écran.

La carte “statique” des antennes répertoriées indique encore un autre identifiant pour l’antenne (toujours très probablement la même) : 780262.

Et on voit ci-dessous, après envoi des données que j’ai collectées, le résultat sur la carte Sensorly (malheureusement il n’est pas possible d’indiquer directement un lieu et niveau de zoom sur la carte). Il a fallu patienter un peu pour que le cache des dalles de la carte soit remplacé par les données à jour. Mon trajet est clairement visible !